Internet est un très grand consommateur d’électricité. Comme vous l’avez peut-être lu dans notre article consacré à la pollution numérique, la part de la pollution produite par nos comportements numériques représente à elle seule à peu près 4% des émissions de gaz à effet de serre. Et cette part ne cesse d’augmenter. Parmi les solutions évoquées pour lutter contre cette pollution, on trouve le web léger, manière de concevoir des sites internet qui sont moins exigeants en énergie. Rencontre avec Anthony Barbarich, créateur de Studio Colibri, agence web spécialisée dans la création de sites légers.
Bonjour Anthony. Avant tout, qui es-tu, quel est ton parcours?
Au risque de passer pour un geek, j’ai toujours été passionné par le web et particulièrement par les « arts digitaux ». Je pense que j’ai commencé à bidouiller sur Photoshop vers 14 ans, sans doute pour me faire un avatar un peu fun sur MSN ou quelque chose dans le genre. Ensuite, je me suis tout doucement tourné vers le code et la création de site web de manière assez organique. Après mes secondaires, j’ai fait suivi un an à Léon-Eli Troclet, à Jemeppe en « Ecriture Multimédia » où j’ai pu déjà développer mes skills en graphisme et en développement web. Et puis, en 2008, j’ai commencé un cursus à l’IHECS où l’on avait régulièrement toutes sortes de travaux pratiques à réaliser. Cela m’a terriblement plu et motivé à évoluer. Après mes études, je me suis rapidement lancé comme indépendant car j’avais déjà un petit portefeuille de clients et il me fallait donc un « statut ». Je suis aussi passé par quelques agences histoire de me faire une expérience de terrain un peu différente puis, il y a deux ans, j’ai décidé de lancer ce projet « Studio Colibri » avec mon ami d’enfance Robin.
La valeur ajoutée de Studio Colibri est de proposer des solutions de web léger. Quelle a été la réflexion derrière ce positionnement?
En termes de « positionnement », cela n’a pas été un choix d’opportunité ou émanant d’une réflexion stratégique particulière mais simplement le croisement de différentes idées que mon (désormais ex) associé et moi évoquions régulièrement lors de nos discussions. Lui éprouvait une forme de frustration par rapport aux technologies populairement utilisées à l’heure actuelle, qui ne sont pas « performantes », et moi je relevais, en consultant différents papiers, de plus en plus cette idée de « pollution numérique » dont il est sujet ici. On s’est rendu compte que nos visions étaient conciliables et répondait finalement au même objectif. On a donc décidé de lancer notre agence « Studio Colibri », visant à créer des sites performants, légers et moins énergivores. On ne savait pas trop où ça nous mènerait ni même s’il existait vraiment un « marché » mais nous avons eu pas mal de retombées presse assez rapidement et depuis nous recevons donc régulièrement des demandes de devis sans prospecter de manière active. Nous avons même depuis l’année passée des stagiaires dans l’équipe.
Mais en fait, c’est quoi « le web léger »?
De manière purement formelle, on pourrait dire que c’est un site dont la transmission de données est limitée, dont les ressources à télécharger pour le consulter ont un poids minime et dont le temps de chargement est moindre. Il y a plusieurs piliers importants à prendre en compte pour diminuer son impact écologique sur internet site et beaucoup nécessitent encore d’être étudiés. Cela dit, limiter le poids des ressources utilisées (image, vidéo, etc.), avoir un code optimisé (pas d’éléments superflus, scripts trop lourds à exécuter,etc.) et considérer un hébergement adéquat jouent un rôle prépondérant dans cette dynamique.
Peux-tu nous donner trois arguments pour nous convaincre d’opter pour un site léger?
- L’expérience utilisateur : des performances optimisées, cela diminue le temps de chargement des pages plus rapide, ce qui est plus confortable pour le visiteur.
- Le référencement : Google, par exemple, va prendre en compte aussi la vitesse de chargement du site et cela pèsera également dans la balance pour apparaître plus haut dans les résultats lors de recherches organiques
- L’impact écologique/énergétique : Chaque consultation de page web demande de l’énergie et génère un impact « carbone ». En optant pour un site plus light on peut diminuer drastiquement cela.
Y a t-il des limites?
Oui bien sûr. Pas tant finalement au niveau du résultat « final » pour l’utilisateur (si ce n’est dans l’utilisation de médias peu gourmands) mais plutôt en terme de gestion du site sur le long terme. Après 2 ans et une bonne dizaine de projets, c’est qui est apparu comme la limite la plus évidente, étant donné que nous utilisons des solutions CMS moins populaires et plus « personnalisées », nos clients n’ont pas toujours la possibilité de rajouter facilement des modules, des plug-ins ou autre (à l’opposé d’un site réalisé avec WordPress par exemple). Même si ça n’a jamais été problématique, il est vrai que nous devons intervenir « à la main » pour faire certaines modifications lorsqu’un client nous le demande. La plupart des fonctionnalités qu’un CMS classique propose sont toutefois toujours bien au rendez-vous et tout reste, en définitive, « faisable ».
Comment ça se passe techniquement?
En gros, nos productions light ne résultent pas d’un travail que je qualifierais de purement « technique » mais plutôt d’« artisanal ». À l’époque où on utilise énormément de « Page Builders », de « templates », de sites tout-faits en somme, nous faisons vraiment un maximum à la main, nous n’utilisons pas vraiment de framework non plus, pour être surs que chaque ligne de code soit pertinente, ait sa place et ne soit pas superflue. Il est courant de charger des « bibliothèques » entières ou des plug-ins très lourds pour simplement utiliser une simple fonctionnalité. Nous essayons d’éviter ça au maximum. En cumulant cela à un design pensé pour être léger en ressources, nous obtenant des résultats généralement plus performants.
Des conseils de lecture si on veut en savoir plus?
- Dernièrement Le Soir a créé une communauté autour de la « pollution numérique » avec pas mal d’experts intervenants, je vous invite à aller y jeter un oeil, c’est bourré de ressources pertinentes.
- Low Tech Magazine, principalement pour le projet “Solar Low Tech Magazine”
- Website Carbon, qui vous permet de tester vos sites pour connaitre leur empreinte carbone
- Dev.to de manière générale pour les actualités du web